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ais… y a des gens que ça intéresse,
ça ? Cette réplique tranchante
lâchée dans le film d’Alain Resnais
On connaît la chanson,
sorti en salles
en 1997, a créé un séisme dans le
très petit milieu des archéologues
médiévistes. La réplique faisait référence à un sujet de
thèse sur lequel travaillait le personnage joué par Agnès
Jaoui : « Les chevaliers-paysans du lac de Paladru vers
l’an mil ». Un sujet visiblement incongru pour les spec-
tateurs, qui éclataient de rire en entendant la réponse
de l’interlocuteur effaré. Tassé dans son siège, l’archéo-
logue médiéviste se sentait ridiculisé et, surtout,
incompris. Le site en question, en cours de fouille à
l’époque, était en effet l’un des chantiers phares de l’ar-
chéologie médiévale. Il se sentait donc en décalage. Des
questions lancinantes taraudaient l’archéologue-
spectateur : pourquoi les scénaristes Agnès Jaoui et
Jean-Pierre Bacri, tant admirés, avaient-ils choisi ce
sujet de recherche pour faire rire le public ? Pourquoi le
Moyen Âge ? Étions-nous si éloignés des préoccupa-
tions de la société française des années 1990 ?
J O Ë L L E B U R N O U F,
a r c h é o l o g u e ,
u n i v e r s i t é P a r i s - 1 P a n t h é o n - S o r b o n n e
& J O S E P H M O R S E L ,
h i s t o r i e n , u n i v e r s i t é P a r i s - 1 P a n t h é o n - S o r b o n n e
L E M O Y E N Â G E
A U J O U R D ’ H U I ,
E N T R E E X O T I S M E
E T H É R I TA G E S
M
Scène extraite de
Monty Python,
sacré Graal,
Terry Gilliam et
Terry Jones, 1975. Cette parodie
de la quête du Graal met en
scène un Moyen Âge si absurde
et déraisonnable que les
personnages du film finissent
par être arrêtés tels des
échappés de l’asile.