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Le c3rv34u statisticien
s’agit d’un mouvement biologique ; la région située
à la jonction des lobes pariétaux et temporaux en
déduit les intentions et les croyances probables de
la personne qui les effectue ; enfin, la région fron-
talemésiale compile des statistiques sur les actions
passées de chaque personne afin d’en déduire des
informations sur son caractère.
L’APPRENTISSAGE
DES MOTS :
UNE INFÉRENCE
STATISTIQUE ?
Comment les enfants parviennent-ils à
inférer autant à partir de si peu ? La question se
pose avec une acuité particulière dans le domaine
du langage, où le linguiste Noam Chomsky a noté
le contraste entre la vitesse extraordinaire d’ap-
prentissage desmots et de la grammaire, et la « pau-
vreté du
stimulus
» que reçoit l’enfant – typiquement
quelques exemples d’usage d’un mot donné. Le
philosophe Willard Van Orman Quine imagine
qu’un enfant voit un lapin et entend quelqu’un
dire « Gavagai ! » : comment peut-il savoir si ce mot
signifie « lapin », « mammifère », « oreilles », « il
court vite » ou une infinité d’autres possibilités ?
manifeste sa surprise si le contenu observé à la fin
de l’expérience ne coïncide pas avec sa prédiction.
Les inférences de l’enfant ne concernent
pas seulement la physique des objets. Le cerveau
humain comprend toute une série de circuits d’in-
férence des états mentaux d’autrui, qu’on décrit
sous l’expression générique de « cerveau social ».
Ces réseaux, actifs dans les premières années
de la vie, permettent à l’enfant de tirer des infé-
rences statistiques sur la présence, les intentions
et les croyances des personnes qui l’entourent. Par
exemple, si un bébé voit qu’une majorité d’objets
rouges sort d’une urne où ceux-ci sont pourtant
en minorité, il en déduit : 1. que c’est une personne
humaine qui effectue le tirage, 2. que celle-ci sélec-
tionne volontairement les objets rouges parce
qu’elle leur attribue de l’importance.
Nous effectuons en permanence des
inférences de ce type lorsque nous interprétons
les paroles et les gestes des personnes qui nous
entourent, et que nous les interprétons comme de
l’ironie, du mensonge, de l’ignorance, etc. Au moins
trois régions cérébrales sont impliquées dans ces
inférences : la région temporale supérieure ana-
lyse le mouvement des corps, et en déduit qu’il