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UN PROCESSUS
FLEXIBLE, DANS DES
CONTEXTES VARIÉS
Cette immersion au cœur d’un projet
VFX nous apporte finalement une per-
ception multiforme du processus de
création : un pipeline de la production
répartissant les tâches, un pipeline des
données formalisant les échanges, et
un meta-pipeline garant du suivi de
l’avancement du projet. Tout cela cou-
ronné par un
asset manager
et, bien
entendu, encadré par des corps de
métier expérimentés et talentueux
sans lesquels ce modèle n’aurait
aucune existence.
Serait-ce donc là l’équation magique
qui transforme les fonds verts du tour-
nage en univers spectaculaires ? Un
petit stage sur le terrain vous en ferait
possiblement douter. Certes, les pré-
cautions et anticipations théoriques
sont précieuses pour limiter les risques,
mais uniquement si ce formalisme est
suffisamment malléable pour digérer
facilement l’imprévisible. Le processus
que nous tentons de décrire se rap-
proche bien plus d’un système orga-
nique, comme celui d’un cerveau dont
la plasticité neuronale remodèle les
connexions en fonction des expé-
riences vécues. Sa richesse provient de
la multitude de possibilités et d’une
adaptabilité guidée par des intentions
artistiques et des contraintes budgé-
taires. Le savoir-faire d’un studio repose
alors avant tout sur l’expérience de ses
équipes et leur capacité à être réac-
tives et efficaces.
Jusqu’à présent, notre intérêt se
concentrait sur le pipeline VFX d’un
seul et même film. Mais, en pratique,
un studio accueille simultanément
entre ses murs les trucages d’une
grande diversité de projets audiovi-
suels. En termes d’organisation, on ne
traite pas de la même façon les VFX
d’une publicité, d’un long métrage ou
d’une série, ou encore les projets d’ani-
mation 2D/3D dont les processus se
démarquent nettement de l’incrusta-
tion. L’hétérogénéité des budgets, des
délais, de la taille des équipes, de l’exi-
gence de qualité visuelle inhérente au
support de projection multiplie les
configurations possibles. Dans le cas,
par exemple, des séries d’animation, la
fabrication est optimisée pour maximi-
ser la réutilisation d’éléments d’un épi-
sode à un autre et automatiser un
grand nombre d’opérations. En publi-
cité, les délais imposent un rythme tel-
lement dense que la question du pipe-
line n’a pas le temps d’être posée. On
privilégie des équipes très réduites et
réactives, habituées aux
retakes
de
dernière minute. Sur les films voués à
la projection salle, l’exigence qualita-
tive est une évidence : une petite
imperfection sur l’écran du graphiste
donnera un tout autre effet sur une toile
de 20 mètres de large.
La variété de ces schémas de produc-
tion renvoie à nouveau à la fameuse
plasticité dont le studio doit faire
preuve pour répondre à la demande.
Dans un contexte d’obsolescence tech-
nique rapide, le parti pris de créer des
logiciels en interne ou de se reposer
FINALISER L’IMAGE
ET LE SON