Santé mentale Médicaments Traitement à la Kétamine pour dépression 10 juin 2023 Question Bonjour, Soigne-t-on à Charles Perrens à Bordeaux la dépression évère par traitement à la Kétamine. Ce traitement est-il au point ??? A Bordeaux et sa proche région y-a-t-il d'autres hôpitaux ou cliniques traitant à la Kétamine. Merci de vos réponses ... précieuses ... Cordialement. Réponse Bonjour, Vous souhaitez savoir si le Centre hospitalier Charles Perrens de Bordeaux prend en charge les personnes souffrant de dépression résistante avec le traitement de kétamine, ou bien si d’autres établissements de la région utilisent cette thérapeutique. Enfin vous souhaitez connaitre l’efficacité de ce nouveau traitement. Le centre hospitalier Charles Perrens de Bordeaux utilise bien cette thérapeutique : Centre Hospitalier Charles Perrens Pôle de Psychiatrie Générale (3/4/7) (CERPAD) 121 Rue de la Béchade, 33000 Bordeaux, France Responsables : Pr Bruno AOUIZERATE, Dr Alexandra BOUVARD https://www.ch-perrens.fr/offre-de-soins/psychiatrie-adulte/centres-experts-et-ressources Lors de nos recherches documentaires, nous n’avons pas trouvé d’établissements en Gironde indiquant sur leur site internet l’utilisation de la kétamine. Cela ne signifie pas non plus que ce traitement ne fait pas partie des thérapeutiques car leur descriptif n’est pas toujours exhaustif. Concernant l’efficacité du traitement, nous avons repéré des articles indiquant un effet positif tandis que d’autres sont plus réservés. Un article récent de L'Encéphale (Volume 48, numéro 4, pages 455-461, août 2022) : L’efficacité de l’eskétamine dans le trouble dépressif majeur résistant : une revue systématique de la littérature / A. Mungo, M. Hein, conclut :Conclusions L’eskétamine intranasale associé à la sertraline, l’escitalopram, la duloxétine ou la venlafaxine à libération prolongée est plus efficace que l’usage en monothérapie de ces quatre molécules dans le cadre du traitement de la dépression résistante. Elle a été démontrée efficace pour une population âgée entre 18 et 74 ans à des doses entre 28 mg et 84 mg. À l’heure actuelle, sur base de ces résultats, son utilisation devrait être proposée comme deuxième palier de traitement après essai infructueux de deux antidépresseurs. https://www.em-consulte.com/article/1531819/article/l-efficacite-de-l-esketamine-dans-le-trouble-depre Le Dr Anne-Cécile Petit du GHU Paris Psychiatrie et Neurosciences, va dans le même sens dans le Compte rendu sur les nouveautés dans le traitement de la dépression présentées lors du Congrès de l'American Psychiatric Association 2022 (Nouvelle-Orléans, USA, 21-25 mai 2022) :Le Pr Roger McIntyre, professeur de psychiatrie et de pharmacologie à l’Université de Toronto, a présenté une synthèse des connaissances sur le traitement par kétamine et eskétamine dans la dépression (McIntyre R et al, AJP, 2021). L’utilisation de la kétamine I.V. puis de l’eskétamine en intra-nasal constitue un grand changement dans la prise en charge des patients souffrant de dépression ne répondant pas aux traitements habituels. L’efficacité de l’adjonction d’eskétamine chez des patients avec une dépression résistante a été montrée dans de nombreuses études. Une méta-analyse (Papakostas et al, 2020) montre une nette augmentation de la réponse (risk ratio = 1,4) et de la rémission (risk ratio = 1,45) grâce à l’adjonction d’eskétamine au traitement habituel (vs placebo). À l’heure actuelle, des études sont encore nécessaires pour pouvoir comparer l’efficacité de la kétamine I.V. par rapport à l’eskétamine intra-nasale (McIntyre RS et al, JAD, 2020), ou encore par rapport aux traitements par neuromodulation. La kétamine pourrait également avoir un intérêt particulier sur certaines dimensions de la dépression, telle que l’anhédonie (Zheng et al, JAD, 2022). Le changement majeur apporté par la kétamine et l’eskétamine est la rapidité d’action du traitement (en quelques heures), qui est corrélée à une modification de la plasticité synaptique. En effet, l’état dépressif est corrélé à une diminution dans la complexité des réseaux de neurones pyramidaux, présents dans le cortex préfrontal, ainsi qu’à une diminution des épines dendritiques de ces neurones, portant les synapses (Holmes, Nat Comm, 2019). La kétamine et l’eskétamine ciblent cette altération, en permettant une récupération de la plasticité synaptique. Ainsi une augmentation du volume de l’hippocampe a été mise en évidence dès 65 minutes après une administration d’eskétamine chez des volontaires sains (Höflich, Transl Psy, 2021). Cet effet rapide peut également bénéficier aux patients avec un risque suicidaire, la kétamine et l’eskétamine ayant montré une efficacité rapide sur l’idéation suicidaire. […] https://www.encephale.com/Actualites/2022/Les-temps-forts-du-Congres-de-l-APA-2022-Partie-2/Rapidite-d-action-de-l-esketamine-et-des-psychedeliques-dans-le-traitement-de-la-depression-une-question-de-neuroplasticite La Haute Autorité de santé (HAS), dans un avis de juin 2020, précise les conditions d’utilisation de ce médicament :Place du médicament : SPRAVATO (eskétamine), en association à un ISRS ou un IRSN, constitue une alternative chez les patients adultes de moins de 65 ans pour le traitement des épisodes dépressifs caractérisés résistants n’ayant pas répondu à au moins deux antidépresseurs différents de deux classes différentes au cours de l’épisode dépressif actuel sévère et en cas de contre-indication ou résistance à l’électroconvulsivothérapie ou pour les patients n’y ayant pas accès ou l’ayant refusé. Dans les autres situations cliniques couvertes par l’AMM, SPRAVATO (eskétamine) n’a pas de place dans la stratégie thérapeutique. https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2020-06/spravato_24062020_synthese_ct18432.pdf Enfin la revue indépendante sur les médicaments Prescrire, met en garde contre cette thérapeutique aux importants effets secondaires : - Dépression résistante : non à l'eskétamine (Spravato°). - Revue Prescrire (2020 ; 40 (444) : 725-726)L'eskétamine en spray nasal (Spravato°) est autorisée dans le traitement des dépressions dites résistantes. Son efficacité est incertaine, et sa balance bénéfices-risques est défavorable, du fait d'effets indésirables graves, notamment des troubles neuropsychiques et cardiaques. L'efficacité des différentes options pour traiter une dépression est le plus souvent au mieux modérée. Le recours aux médicaments antidépresseurs est fréquent. Quand la réponse est jugée insuffisante, les diverses options sont d'intérêt incertain et ont peu été comparées entre elles : psychothérapie, augmentation de la posologie de l'antidépresseur, changement de groupe pharmacologique d'antidépresseur, ajout d'un neuroleptique, etc. En 2019, l'eskétamine (Spravato°) a été autorisée en Europe en spray nasal, associée avec un autre antidépresseur, en cas d'épisode dépressif dit résistant après deux antidépresseurs différents. Dans cette situation, l'efficacité de l'eskétamine est très incertaine. En revanche, ses effets indésirables sont voisins de ceux bien connus de la kétamine (Kétamine Panpharma° ou autre) dont elle est proche, surtout : des syndromes de dissociation observés chez 60 % à 79 % des patients (hallucinations, confusions, distorsions du temps et de l'espace, altérations sensorielles, sensations d'être en dehors de son propre corps), des effets sédatifs allant jusqu'à la perte de conscience avec dépression respiratoire, des poussées hypertensives, etc. Un risque d'addiction et d'usage détourné est prévisible. Elle est rangée parmi les stupéfiants. Pour limiter les risques pour le patient, chaque séance de traitement est à effectuer dans un établissement de santé sous la surveillance d'un soignant pendant deux heures (pour le rassurer, le mettre si besoin en position latérale de sécurité, etc.). Le profil d'effets indésirables est un des principaux éléments à prendre en compte dans le choix d'un antidépresseur ; l'eskétamine est à éviter. ©Prescrire 1er octobre 2020https://www.prescrire.org/fr/3/31/60084/0/NewsDetails.aspx - Pour mieux soigner, des médicaments à écarter - bilan 2023. - Revue Prescrire, (Décembre 2022 • Tome 42 N° 470 • Page 936-13)[…] • L’eskétamine en solution pour pulvérisation nasale (Spravato°), a une efficacité très incertaine dans les dépressions dites résistantes et les dépressions avec risque suicidaire élevé. Ses effets indésirables neuropsychiques sont fréquents, dont des syndromes de dissociation. Un surcroît de risque suicidaire a été rapporté dans les semaines qui ont suivi le traitement. Des addictions et des détournements d’usage sont à prévoir (n° 444 p. 725-726 ; n° 461 p. 170-171). Dans chacune de ces situations cliniques difficiles, il est plus prudent de ne pas compter sur l’eskétamine et d’envisager d’autres options moins dangereuses, même si leur efficacité clinique est incertaine, par exemple : psychothérapie, parfois avec hospitalisation ; augmentation de la dose de l’antidépresseur ; changement de groupe pharmacologique d’antidépresseur. https://www.prescrire.org/Fr/C7AC5CED06679C53DE0DD9F547D89B41/Download.aspx Nous espérons que ces informations vous seront utiles et restons à votre disposition pour toute recherche documentaire dans le domaine de la santé. L’Equipe des documentalistes de Questions-santé, Le service de réponses en ligne de la Cité de la santé. Service Questions-santé http://www.cite-sciences.fr/fr/au-programme/lieux-ressources/cite-de-la-sante/ Avez-vous trouvé cette réponse utile ? Oui cette réponse m'a été utile / Non cette réponse ne m'a pas été utile Avez-vous trouvé cette réponse utile ? Remplissez le formulaire de satisfaction !