Vaccination prime-boost hétérologue après 55 ans
Question
Peut-on me refuser un vaccin prime boost hétérologue ? J’ai 71 ans. (1er injection AstraZeneca 25/3) Si oui, combien de temps, dois-je attendre pour perdre mon immunité et recommencer une vaccination ARN ? Merci
Réponse
Bonjour,
Agée de 71 ans, vous avez reçu une 1ère injection du vaccin d’AstraZeneca et souhaitez savoir si vous pouvez bénéficier de la stratégie de prime-boost hétérologue en recevant une injection d’un vaccin à ARNm. Si tel n’était pas le cas, vous souhaitez savoir combien de temps il vous faudrait attendre pour recommencer un cycle de vaccination contre la Covid-19 avec un vaccin à ARNm.
Pour resituer les raisons de la recommandation de la HAS, voici un article du Vidal datée du 29 avril 2021 :
Les recommandations de la HAS pour les jeunes primovaccinés avec VAXZEVRIA
Le 8 avril 2021, la HAS a publié une recommandation concernant la dose de rappel des personnes de moins de 55 ans ayant reçu une première dose de VAXZEVRIA. En effet, à la suite de l'analyse d'effets indésirables graves et exceptionnels constatés avec ce vaccin (thromboses veineuses cérébrales, parfois associées à une thrombopénie), chez des patients relativement jeunes, la HAS a restreint l'usage de ce vaccin aux personnes d'au moins 55 ans. Il fallait donc statuer sur la stratégie de rappel chez les 533 000 personnes de moins de 55 ans ayant reçu une 1re injection de VAXZEVRIA à la date de cette restriction d'usage (19 mars 2021).
Dans son avis, la HAS a recommandé que celles-ci reçoivent une 2e injection (le « boost ») d'un vaccin à ARN messager (COMIRNATY ou COVID-19 VACCINE MODERNA), 12 semaines après la 1re injection de VAXZEVRIA. Mais sur quelles bases scientifiques cet avis a-t-il été bâti ?
[…]
Même si la recommandation de la HAS concernant les personnes de moins de 55 ans ayant reçu une 1re injection de VAXZEVRIA, à savoir de recevoir un vaccin à ARNm 12 semaines plus tard, est fondée sur des bases scientifiques parcellaires, cette décision, si elle s'accompagne véritablement du suivi immunologique recommandé par l'agence, pourra apporter des données complémentaires à l'étude COM-COV2.
Dans quelques mois, nous devrions disposer de davantage de données expérimentales pour éclairer et optimiser une stratégie de prime-boost hétérologue raisonnée, et profiter d'une éventuelle synergie entre vaccins, afin de mettre un terme à cette pandémie.
Le site MesVaccins.net vous apporte des compléments sur le schéma vaccinal hétérologue « prime-boost » dans un document du 22 mai 2021 :
Le schéma vaccinal hétérologue "prime-boost" - vaccin d'AstraZeneca suivi du vaccin de Pfizer-BioNTech - à la fois plus réactogène et plus immunogène
Cette stratégie peut présenter des risques qui doivent être évalués. Par exemple, les deux vaccins, agissant par des mécanismes différents, pourraient ne pas se complémenter (il n'y aurait pas d'effet de renforcement de l'immunité par la deuxième dose) ou même avoir des effets antagonistes, conduisant à une immunité de trop faible niveau ou à des effets indésirables plus marqués ou nouveaux. Une première étude randomisée de la combinaison des vaccins Vaxzevria et Comirnaty dans une stratégie prime-boost hétérologue vient d'être brièvement présentée dans le Lancet (1). Après tirage au sort, les 830 participants ont été vaccinés selon l'un des 4 schémas possibles (1ère dose/2ème dose) : Vaxzevria/Vaxzevria, Vaxzevria/Comirnaty, Comirnaty/Comirnaty, Comirnaty/Vaxzevria. Le délai entre les deux injections a été de 28 ou 84 jours. Les participants étaient âgés de 50 ans ou plus, n'avaient pas de comorbidités ou des comorbidités bien contrôlées, et ils ignoraient quel schéma vaccinal leur était appliqué (simple aveugle).
Les résultats présentés sont intermédiaires et ne concernent encore que les effets indésirables observés après les deux injections, dans le groupe des 463 volontaires devant recevoir leurs deux doses à 28 jours d'intervalle. Dans les groupes ayant reçu deux fois le même vaccin (stratégie homologue), les réactions générales (fièvre, frissons, malaise, myalgies, fatigue) ont été plus marquées après la première injection avec Vaxzevria, et après la seconde avec Comirnaty. Dans les deux groupes ayant reçu un schéma hétérologue, les réactions après la seconde injection ont été plus fréquentes et plus intenses que dans les schémas homologues. Il n'a pas été rapporté d'effet indésirable non identifié précédemment. Les analyses hématologiques n'ont mis en évidence de thrombocytopénie dans aucun groupe. Les auteurs soulignent toutefois que les effets rapportés par les participants de 50 ans et plus inclus dans leur étude pourraient être plus marqués chez les individus moins âgés qui sont concernés par les mesures envisagées, en France et dans d'autres pays, en réponse aux accidents survenus avec Vaxzevria. Dans l'attente des données d'efficacité qui devraient être disponibles en juin, et de celles des essais menés avec les vaccins de Moderna et de Novavax, ils concluent que les stratégies hétérologues pourraient avoir quelques désavantages en termes de tolérance, que la prescription systématique de paracétamol permettrait peut-être d'atténuer.
Une étude menée en Espagne, qui vient d'être annoncée, rapporte des résultats très comparables (2). Elle a inclus 670 volontaires âgés de 18 à 59 ans, ayant reçu une première dose de Vaxzevria (2). Parmi eux, 450 ont reçu ensuite une injection de Comirnaty. Chez ces derniers, la médiane des titres d'anticorps anti-SARS-CoV-2 a été multipliée par 150 par rapport à ceux qui n'ont reçu que la première injection. Les anticorps neutralisants (c'est-à-dire capables d'empêcher l'infection par le virus de cellules cultivées in vitro) étaient 7 fois plus élevés en moyenne que chez les personnes ayant reçu une dose du vaccin d'AstraZeneca ; les auteurs estiment que cette augmentation est plus élevée que celle décrite avec d'autres schémas de vaccination homologues (notamment après la seconde dose de Vaxzevria). Seuls 1,7 % des vaccinés ont présenté des effets indésirables qualifiés de "sévères" (céphalées, myalgies, malaises), toujours résolutifs. Là encore, les données d'efficacité (protection contre l'infection) sont attendues.
A la lecture de ces documents, on constate que la stratégie de prime-boost hétérologue pose encore de nombreuses questions sur son efficacité et sur sa tolérance. Par ailleurs, comme l’explique l’article du Vidal, elle est mise en place dans un contexte très particulier d’effets secondaires graves mais rares principalement chez des personnes de moins de 55 ans. Nos recherches documentaires ne nous ont pas permis d’identifier d’articles recommandant l’utilisation de ce schéma vaccinal chez des personnes âgées de plus de 55 ans.
Quant à la durée de l’immunité conférée par les vaccins, les données ne cessent d’évoluer. On peut ainsi lire dans un article du Vidal (l’une des références dans l’information sur les produits de santé), La vaccination contre la COVID-19 ? (03/05/21) :
Le vaccin AstraZeneca (ChAdOx1-nCoV19) semblait lors des études pour sa mise sur le marché un peu moins efficace avec, en moyenne, 70,4 % de protection contre les formes symptomatiques de COVID-19, avec une forte disparité entre les personnes ayant reçu une demi-dose, puis une dose complète (90 % de protection) et ceux ayant reçu deux doses complètes (62,1 %). Initialement, aucune conclusion n’avait pu être tirée sur l’efficacité de ChAdOx1-nCoV19 chez les personnes âgées de plus de 55 ans ou souffrant de maladies aggravant le risque de COVID-19 sévère (quasi absentes des essais analysés), ni envers la prévention des formes graves ou asymptomatiques, ni sur la durée de l’immunité conférée. Des nouvelles données britanniques, obtenues en vie réelle, suggèrent une efficacité du vaccin AstraZeneca chez les plus de 65 ans de 94 % (taux de protection contre les hospitalisations entre 28 et 34 jours après la première injection).
https://www.vidal.fr/maladies/voies-respiratoires/coronavirus-covid-19/vaccins.html
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Réponse du 09/06/21