Mars 2017

Éliminer la maladie, la souffrance, le handicap, la pauvreté ; augmenter nos performances physiques et intellectuelles ; vaincre la vieillesse et la mort, tels sont les buts du transhumanisme. Ce rêve est-il possible ? Et si la réponse est oui, est-il souhaitable et raisonnable de transformer l’humain en post-humain ?

Né aux États-Unis il y a une trentaine d’années, le mouvement transhumaniste ambitionne d’améliorer l’espèce humaine et de prolonger l’âge de la vie le plus longtemps possible grâce aux sciences et aux nouvelles technologies. Les transhumanistes considèrent que la nature est mal faite et utilisent les nouvelles technologies pour corriger le hasard et les erreurs de la nature.

De nombreux scientifiques américains et asiatiques, d’importants laboratoires de recherche et des sociétés très puissantes telles Google, la NASA, le MIT, ARPANET, etc. travaillent sur des technologies de pointe pour qu’un jour, l’humain fusionne avec la machine et devienne un humain perfectionné, augmenté de prothèses, d’implants et quasi invincible.

Dotés de meilleures perceptions, de capacités intellectuelles, physiques et psychologiques décuplées, débarrassés des maladies, des handicaps, de la vieillesse mais aussi de tout ce qui nous entrave et nous ralentit, nous pourrions alors atteindre le rêve de devenir invulnérables et immortels.

Le transhumanisme s’appuie sur quatre grandes technologies

Pour accomplir ce but, quatre grandes technologies se croisent et sont au cœur des recherches menées par le mouvement transhumaniste : les NBIC, c'est-à-dire :

  • N pour les nanotechnologies qui permettent de fabriquer et de manipuler des matériaux et des dispositifs à l’échelle du milliardième de mètre. Des nano-robots microscopiques pourraient ainsi se promener dans notre corps pour vérifier que tout va bien et réparer des défaillances en cas de besoin ;
  • B pour les biotechnologies, où les recherches portent sur les cellules souches  et la médecine régénérative censée fabriquer des tissus vivants, sur la génétique et sur le pouvoir de réécrire le génome ;
  • I pour l’informatique qui permet de traiter des quantités phénoménales de données, ainsi que l’intelligence artificielle qui vise à reproduire le fonctionnement du cerveau humain chez un logiciel ou un robot ;
  • C pour les sciences cognitives qui s’intéressent aux mécanismes de la pensée, de la perception, du langage, de la mémoire, de l’intelligence, tant chez l’humain, l’animal ou la machine.

On pourrait aussi ajouter la biomécanique et la robotique qui jouent un rôle essentiel dans l’hybridation entre l’humain et la machine. Il est aujourd’hui possible de greffer sur une personne un bras bionique (c’est-à-dire robotisé) contrôlé par la pensée. Le transhumanisme souhaite aller bien plus loin pour qu’un jour des humains reçoivent des greffes de parties mécaniques et puissent multiplier leur force, leur vitesse, leur tonus…

Quand la fiction rattrape la réalité

Les recherches vont bon train pour réussir un jour à fabriquer toutes sortes de prothèses et d’implants pour non seulement remplacer un organe ou un membre amputé, mais aussi pour augmenter nos performances à la manière des cyborgs. Des chercheurs travaillent par exemple sur la mise au point d’une lentille bionique, qui en plus de nous apporter une vision optimale, permettrait de zoomer sur un objet et donnerait accès au cyberespace en surimpression de la vision.

Certaines technologies font beaucoup fantasmer. Parmi elles :

  • Les cellules souches qui permettent de faire régresser des cellules malades à l’état de cellules régénératives, potentiellement immortelles, et l’ambition de fabriquer des organes pour des autogreffes ;
  • La technique du CRISPR-Cas9, sorte de ciseau biologique servant à remplacer des fragments d’ADN par une autre séquence. Elle permet de littéralement réaliser des couper/coller dans les gènes. Cette technologie va relancer les thérapies géniques et permettre de traiter des patients atteints de maladies génétiques ;
  • Le mind uploading,  c’est-à-dire le téléchargement de l’esprit, un processus imaginaire consistant à télécharger le contenu d’un cerveau sur un matériau inaltérable en vue d’être implanté à volonté sur un corps ou un robot, garantissant ainsi la perpétuation de notre conscience et... la vie éternelle.

Ces technologies sont récentes mais avancent à pas de géants. Elles ont déjà fait d’immenses bonds en avant dans le domaine de la santé, notamment grâce aux implants cochléaires qui redonnent l’ouïe aux sourds, aux avancées sur les interfaces homme-machine qui rendent possibles les greffes de membres bioniques et aux thérapies géniques qui permettront d’ici dix ans de se débarrasser de maladies comme le cancer en reprogrammant des cellules.

Des technologies pour le meilleur… ou pour le pire ?

Tant qu’on reste dans le domaine de la santé, ces technologies sont formidables : en effet, éliminer les maladies ou mettre au monde des enfants à la carte en étant sûr qu’ils n’auront pas de maladie est le rêve de tout parent !  Mais quand on envisage d’améliorer l’humain, beaucoup de questions philosophiques se posent.

Des laboratoires chinois sont déjà en train de séquencer l’ADN d’individus surdoués à très fort quotient intellectuel pour pouvoir produire des ingénieurs à la chaîne et permettre à des couples très riches de recourir à la fécondation in vitro pour sélectionner les embryons les plus intelligents ! L’utilisation du CRISPR-Cas9 pourrait également nous mener vers un eugénisme où l’on fabriquerait des êtres modifiés très beaux, très forts, très intelligents…

Il y a trois ans, l’astrophysicien Stephen Hawkins a déclaré dans une interview que « le développement d’une intelligence artificielle autonome pourrait signer la fin de l’humanité». Réussir la fusion d’un humain avec une machine, ferait certainement triompher l’ère d’une nouvelle espèce. Mais voulons-nous vraiment cela ?

Si la mort est un jour vaincue, la question se pose de savoir comment faire vivre des habitants toujours plus nombreux sur une planète finie dont la taille et les ressources n’augmentent pas. De plus, si la mort était un jour dissipée, la reproduction sexuée serait sans doute remplacée par un clonage reproductif et les naissances seraient alors totalement encadrées, programmées, décidées.

Sans même extrapoler jusqu’à vaincre la mort, la question d’un allongement accru de la vie pose aussi beaucoup de questions : vivre plus vieux, nécessite une médecine toujours plus performante, une chirurgie de pointe, des technologies innovantes et coûteuses. Or, il semble irréaliste que ces technologies profitent à tous lorsqu'une majorité d’individus n’a pas accès aux soins de base et que l'on meurt toujours du paludisme ou de la rougeole. Seule, une petite minorité aurait les moyens d’être augmentés et soignés pour vivre plus longtemps. Quel sort serait réservé à tous les autres ?

Ces technologies vont révolutionner nos sociétés. Il est donc capital de comprendre ce que la science est en passe de réaliser sans se laisser entraîner dans des délires d’apprentis-sorciers. Pour cela, il nous faut rester informés sur ces technologies et nous interroger sur toutes leurs conséquences, de façon à pouvoir orienter, décider et choisir notre futur, en citoyens éclairés.

Pour aller plus loin…

Un article rédigé par le Radis vert à partir des sources suivantes :

Iatranshumanisme.com ; jeudedebat.com ; franceinter.fr ; nouvelobs.com ; huffingtonpost.fr ; inserm.fr ; wikipédia.org