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Cerveau des psychopathes différent ?

Question

Bonjour, j'aimerais savoir si le cerveau des psychopathes (ou sociopathes) diffère ou non des cerveaux lambda svp? Merci

Réponse

Bonjour,

Vous souhaitez savoir s’il existe des différences entre le cerveau d’un psychopathe et un cerveau dit « normal ».

A titre d’information générale, voici les explications de Valeria Sabater, diplômée en psychologie à l’Université de Valence (Espagne) au sujet de la neurobiologie de la personne psychopathe :

Le cerveau d’une personne psychopathe fonctionne différemment.
Au-delà de leur manque d’empathie, nous retrouvons d’autres facteurs singuliers qui laisseraient une trace cérébrale caractéristique chez 1% de la population. Selon les experts, celle-ci pourrait présenter des traits psychopathes clairement significatifs.
Dans une étude très intéressante réalisée en 2012 au King’s College de Londres, une chose que le docteur Fallon avait déjà observée en 2006 dans ses recherches avec des prisonniers a été prouvée.
Les personnes chez qui une psychopathie avait été diagnostiquée présentaient moins de matière grise dans le cortex préfrontal et dans les pôles temporaux.
[…]
Pour ce travail, 121 résonances magnétiques ont été effectuées sur des prisonniers présentant ce trouble de la personnalité. Lorsque des images de personnes qui souffraient ont été montrées à ces reclus, leur cerveau ne réagissait pas. Cependant, il a bien réagi au moment où on leur a demandé de s’imaginer dans cette même situation.
Mais le plus étonnant est apparu plus tard. Les chercheurs ont remarqué que quand ces personnes voyaient d’autres gens souffrir et ressentir de la douleur, une activité élevée se déclenchait dans le corps strié. Il s’agit d’une partie très intéressante du cerveau humain car elle est liée au processus de récompense, à la motivation, au plaisir et à la prise de décisions.
Ainsi, cette activité inhabituelle dans cette aire démontrait quelque chose de très clair: les psychopathes aiment voir les autres souffrir.
[…]
Il existe des variantes génétiques qui définissent la plus grande tendance à la violence. Par exemple, les gènes CDH13 et MAOA.
Des neuroscientifiques de l’Institut Karolinska ont révélé que nous pouvions tous hériter de ce type de variantes de nos parents (s’ils l’avaient). Cependant, tout le monde ne les manifeste pas.
[…]
La neurobiologie du psychopathe nous dit souvent que cette condition surgit comme un trouble ponctuel du développement. Parfois, un manque d’attachement, un trauma au moment de l’enfance ou n’importe quelle situation de stress et d’angoisse chez un enfant peuvent générer une série d’altérations biochimiques. Ces dernières déterminent un changement progressif dans le cerveau et le comportement.

https://nospensees.fr/neurobiologie-du-psychopathe-quand-le-cerveau-perd-son-humanite/

En complément, nous vous invitons à consulter :

- sur le site du Figaro santé, un article (18/03/2019) sur les adolescents psychopathes :

En étudiant des adolescents dotés, donc, de tous les traits de la psychopathie (« insensibilité aux autres », « contrôle de soi limité » et « comportement antisociaux comme la manipulation ou la duperie »), Abigail Marsh a montré que ces derniers «ne présentaient, en moyenne, aucune activation de l’amygdale droite [petite structure enfouie au cœur du cerveau, NDLR] quand ils regardaient le visage d’une personne ayant une peur intense ». Or si quelqu’un est incapable de détecter la peur chez l’autre, et dans une certaine mesure de ressentir la peur lui-même, « comment peut-on s’attendre à ce qu’il ait de l’empathie avec cette émotion chez les autres? ».

https://sante.lefigaro.fr/article/selon-que-vous-serez-heros-ou-psychopathe/
Ce livre intitulé Altruistes et psychopathes. Leur cerveau est-il différent du nôtre / Abigail Marsh. (éd. HumenSciences, 2019) est disponible à la Cité de la santé à la cote V 7 3 MARSA.

Si vous souhaitez aller plus loin, voici 2 extraits plus scientifiques :

- La psychopathie – L’éclairage des neurosciences médicolégales, revue l’Encéphale / J.Decety, université de Chicago, Département de psychologie et département de psychiatrie et neuroscience comportementales, février 2020 :

Résumé
La psychopathie correspond à un cluster de traits de personnalité caractérisé par des symptômes de détachement émotionnel, un manque d’empathie, de culpabilité et de remords, une irresponsabilité, combinés à une propension à avoir des comportements impulsifs. Cet article évalue de façon critique la contribution de la neuro-imagerie anatomique et fonctionnelle dans le milieu carcéral nord-américain dans la compréhension étiologique de ce désordre de la personnalité. Les études en neurosciences légales rapportent de nombreuses anomalies structurelles et fonctionnelles qui ne se limitent pas à l’amygdale et au cortex préfrontal ventromédian, mais incluent le striatum, l’hippocampe et le faisceau unciné. Ces anomalies cérébrales sous-tendent un fonctionnement atténué du traitement des émotions et l’aversion aux signaux négatifs ainsi qu’un traitement atypique dans les processus de renforcement, de représentation des récompenses et de modulation de l’attention qui ont un impact dans la prise de décision, le souci de l’autre et le jugement moral. Il est important de noter que les différences neuro-anatomiques, neurofonctionnelles et comportementales entre les personnes qui ont des traits psychopathiques élevés et ceux qui ont des traits faibles sont hétérogènes et d’avantage de degrés que de nature.
[…]
Les apports de l’imagerie cérébrale
L’ensemble des études en neurosciences légales indiquent que les traits psychopathiques sont étroitement associés à des anomalies structurelles et fonctionnelles distribuées dans de nombreuses structures corticales et sous-corticales (amygdale, insula, cortex cingulaire antérieur et postérieur, striatum dorsal et ventral, cortex orbitofrontal, cortex supérieur temporal postérieur) ainsi qu’à une connectivité anatomique atypique entre le pôle temporal et le cortex préfrontal ventromédian. Ces déficits anatomiques dans la matière grise et dans la matière blanche sont donc assez hétérogènes. Il semble moins probable aujourd’hui que les déficits liés à la psychopathie se limitent à l’amygdale et au cortex orbitofrontal. Cette variabilité implique la possibilité que de multiples voies neurodéveloppementales puissent conduire à des phénotypes comportementaux d’apparence similaires. Une limitation des modèles actuels de la psychopathie réside dans le fait qu’ils s’appuient principalement sur des traits de personnalité et des patterns de comportement assez mal définis pour opérationnaliser un construit pour lequel nous tentons de décrire une origine neurobiologique spécifique. Les problèmes neurobiologiques sont cependant hétérogènes. Ils peuvent survenir indépendamment et se manifester par des symptômes compatibles avec les traits psychopathiques.
Dans l’état actuel des connaissances, il est prématuré d’interpréter les résultats des neurosciences cliniques comme appuyant un modèle étiologique particulier.
Dans le large éventail de données, on peut trouver un soutien aux théories soulignant des déficits dans les circuits liés au traitement des émotions, aux difficultés d’apprentissage et de conditionnement (absence de refus d’une récompense lorsque celle-ci est associée à un renforcement négatif), d’évitement de stimuli aversifs, ainsi que des déficits neurocognitifs caractérisés par un dysfonctionnement des processus liés au traitement attentionnel.

https://www.em-consulte.com/article/1360598/la-psychopathie%C2%A0%E2%80%93%C2%A0l-eclairage-des-neurosciences-me

- Manuel de psychiatrie / sous la dir. Julien Daniel Guelfi, Frédéric Rouillon, Luc Mallet. – Elsevier Masson, 2021. – 4e éd.

Une des premières études ayant mis en évidence un lien entre le cortex préfrontal médian et la psychopathie a été l’étude post-mortem du crâne de Phineas Gage. Cet homme décrit comme fiable et digne de confiance devint irrespectueux, impulsif et infidèle à la suite d’un accident de travail où une barre de fer lui traversa la tête.
Des études plus récentes ont pu étayer l’implication du CPFVM [cortex préfrontal ventromédian] sur la dimension de connectivité fonctionnelle entre le CPFVM et l’amygdale, ainsi qu’avec le cortex pariétal médian
Comme nous l’avons vu précédemment, le CPFVM fait partie du DMN [réseau de mode par défaut]. De manière intéressante, l’implication du DMN dorsal dans le détachement émotionnel retrouvé chez les psychopathes a pu être mise en évidence.  (pp.345-346)

En tant que documentalistes, nous ne pouvons aller plus loin dans notre réponse et espérons que ces informations vous seront utiles.

L’Equipe des documentalistes de Questions-santé,
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