Maladies et problèmes de santé Cancérologie Endocrinologie Environnement et santé Cancer du sein, hyperthyroïdie, perturbateurs endocriniens 25 novembre 2021 Question Existe-t-il un lien entre l'hyperthyroïdie et le cancer du sein ? Quels perturbateurs endocriniens sont liés au développement d'un cancer du sein ? Réponse Bonjour, Vous avez eu un cancer du sein et vous souhaitez savoir s’il y a un lien entre l’hyperthyroïdie et le cancer du sein. Vous souhaitez également savoir quel rôle les perturbateurs endocriniens peuvent avoir joué dans le déclenchement de cette pathologie. En ce qui concerne votre 1ère interrogation, nous vous proposons des extraits d’un article de la revue Gynécologie Obstétrique Fertilité & Sénologie (Volume 46, numéro 4, pages 403-413, avril 2018) : Hyperthyroïdie et cancer du sein : y a-t-il une association ? / E. Cordel, N. Reix, S. Molière, C. Mathelin sur le site EMConsulte des éditions Elsevier Masson, référence dans la documentation médicale. Nous vous proposons un extrait de la base EMPremium, accessible pour nos abonnés :Discussion Le lien entre l’hyperthyroïdie et le cancer du sein a fait par le passé l’objet de nombreuses controverses et d’une abondante littérature, posant un problème clinique quotidien de l’information et du suivi sénologique des patientes thyropathes. Notre revue de la littérature, portant sur 22 études récentes (de 2002 à 2017), a tenté de clarifier cette problématique en montrant que dans la plupart des études, les femmes ayant une hyperthyroïdie (qu’elle soit clinique et/ou biologique, liée à une maladie de Basedow ou non) ont plus de risque de développer un cancer du sein notamment lorsqu’elles sont ménopausées. Des contradictions persistent toutefois sur les types de cancers mammaires observés et leur pronostic. […] 4.3 Effet de l’hyperthyroïdie et des hormones thyroïdiennes sur le risque de cancer du sein Parmi les 15 études ayant observé une association entre hyperthyroïdie clinique ou biologique et cancer du sein, les résultats émanant de 8 d’entre elles [19–21,23,28,32–34] apparaissent particulièrement robustes, du fait du grand nombre de patientes incluses (allant de 2185 à 80 343), de leur longue période de suivi (allant de 7,4 a` 23,3 ans) et de la prise en compte de multiples facteurs de confusion. Parmi les études négatives, celle de Chan et al. [22] est robuste en ce qui concerne la durée de suivi et l’ajustement aux principaux facteurs de risque du cancer du sein, mais n’incluait que des patients sans hyperthyroïdie patente et seulement 100 cas de cancers du sein étaient diagnostiqués, limitant la puissance de l’étude. L’étude de Hellevik et al. [35] est robuste en ce qui concerne le nombre d’individu et le nombre de cancer du sein, mais là aussi avec un nombre d’hyperthyroïdies patentes peu important. Quoiqu’il en soit, pour l’ensemble des études incluses dans notre revue montrant une association épidémiologique entre hyperthyroïdie et cancer du sein, l’amplitude du sur-risque est faible, compris entre 1 et 2, à mettre en rapport avec d’autres facteurs de risque plus importants comme les antécédents personnels (risque histologique) ou familiaux. Ce sur-risque relativement faible reflète probablement l’hétérogénéité ́ des résultats des différentes études cliniques. En ce qui concerne la maladie de Basedow, l’ensemble des études [17,19,20,31] identifiait un sur-risque significatif de cancer du sein allant de 1,09 à 2,06. De manière intéressante, Chen et al.[19] ont montré ́ qu’il y avait davantage de risques de développer un cancer du sein en cas de maladie de Basedow dans les trois premières années qui suivaient le diagnostic. 4.4. L’impact des différentes hormones thyroïdiennes et leur seuil La plupart des études observent un lien positif entre un taux élevé en hormones thyroïdiennes périphériques et la survenue d’un cancer du sein. Il faut toutefois noter une importante hétérogénéité dans les méthodes et les résultats des études [25,28,32,34] : taux d’hormones totales versus libres, T3 versus T4, définition des valeurs seuil. Si ces résultats sont importants du point de vue physiopathologique, il semble donc difficile de les appliquer en pratique quotidienne. 4.5. L’impact des hormones thyroïdiennes sur le tissu mammaire Les récepteurs aux hormones thyroïdiennes sont présents au sein des cellules mammaires et ont un rôle dans le développement et la différenciation du tissu mammaire normal. Ces récepteurs sont également présents au niveau des cellules cancéreuses du sein, bien que leurs rôles dans le cancer du sein ne soient pas totalement appréhendés. In vitro, Hall et al. [12] ont montré que les hormones thyroïdiennes jouaient un rôle prédominant dans le développement du cancer du sein en régulant la prolifération cellulaire et l’expression des gènes impliqués dans la genèse du cancer du sein. Par ailleurs, des interactions ont été observées entre les systèmes de signalisation propres à la voie des œstrogènes et à celle de la T3. La T3 pourrait donc mimer voire potentialiser les effets des œstrogènes sur la prolifération des cellules du cancer du sein. De même, Conde et al. [41] ont émis l’hypothèse que l’expression des récepteurs aux hormones thyroïdiennes jouerait un rôle essentiel dans le développement du cancer du sein via une possible dérégulation de certaines voies de signalisation. Dinda et al. [42] ont également observé dans des analyses in vitro, que la T3 avait des effets comparables à ceux des œstrogènes sur la régulation de l’activité des protéines suppresseurs de tumeur (p53 et rétino-blastome) au niveau des cellules du cancer du sein. Par conséquent, la T3 aurait des effets stimulants sur la prolifération des cellules cancéreuses. Nogueira et Brentani [43] ont aussi constaté, via leurs études moléculaires, que la T3 mimait les effets des œstrogènes en stimulant la croissance cellulaire, en modulant la transcription des facteurs de croissance et en induisant l’expression et l’activité des protéines sous contrôle des œstrogènes. Sur un plan histologique, seuls Søgaard et Brandt [21,28] ont mis en évidence un lien entre hyperthyroïdie et positivité des récepteurs hormonaux au niveau des cellules cancéreuses. Concernant les autres paramètres histologiques (grade, taille tumorale, atteinte ganglionnaire, expression d’HER2), les analyses de la littérature [34] sont contradictoires et ne permettent pas de connaître avec précision l’impact des hormones thyroïdiennes sur l’agressivité tumorale. Des études complémentaires paraissent nécessaires […] 5. Conclusion Une association entre hyperthyroïdie et cancer du sein est observée par une majorité d’études épidémiologiques de qualité, et appuyée par des hypothèses physiopathologiques solides. Toutes les causes d’hyperthyroïdie semblent impliquées dans cette association, plus particulièrement la maladie de Basedow. L’amplitude du sur-risque semble néanmoins faible (risque relatif compris entre 1 et 2) pouvant expliquer l’hétérogénéité ́ des résultats de la littérature. Il se conjugue potentiellement aux autres facteurs de risque de cancer du sein, dont l’obésité. Le dépistage organisé du cancer du sein repose, en France, sur la réalisation d’un examen clinique et d’une mammographie (éventuellement associée à une échographie) tous les 2 ans de 50 à 74 ans. S’il est particulièrement important de promouvoir ce dépistage organisé du cancer du sein dans la population générale, c’est encore plus vrai en cas d’hyperthyroïdie. Aux femmes plus jeunes doit être rappelé l’intérêt du de ́pistage clinique annuel et de l’auto-examen des seins, qui pourra être expliqué à certaines occasions, par exemple, à l’annonce du diagnostic d’une maladie de Basedow.https://www.em-consulte.com/article/1210726/article/hyperthyroidie-et-cancer-du-sein%C2%A0-y-a-t-il-une-ass Concernant l’impact des perturbateurs endocriniens sur l’apparition d’un cancer du sein, nous vous proposons de parcourir plusieurs documents : - dossier de l’Institut national du cancer (INCa) : Les perturbateurs endocriniensD’après l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), « les perturbateurs endocriniens sont des substances chimiques d'origine naturelle ou artificielle étrangères à l'organisme qui peuvent interférer avec le fonctionnement du système endocrinien et induire ainsi des effets néfastes sur cet organisme ou sur ses descendants […] Perturbateurs endocriniens et risque de cancers […]https://www.e-cancer.fr/Professionnels-de-sante/Facteurs-de-risque-et-de-protection/Environnement/Perturbateurs-endocriniens#toc-perturbateurs-endocriniens-et-risque-de-cancers - Centre Léon Bérard (Centre de lutte contre le cancer de Lyon et de Rhône-Alpes) : Perturbateurs endocriniens et risques de cancer https://www.cancer-environnement.fr/274-Perturbateurs-endocriniens.ce.aspx Un site du Centre Léon Bérard : Portail d'information des publics Cancer Environnement - Cancer du sein[…] Des perturbateurs endocriniens (DDT, PCB, dioxines) sont suspectés d’avoir un rôle dans les cancers hormono-dépendants comme le cancer du sein. Les liens entre l’exposition à ces substances et le risque de cancer du sein restent cependant à établir. […]https://www.cancer-environnement.fr/144-Cancer-du-sein.ce.aspx Nous espérons que ces informations vous permettront d’enrichir le dialogue avec l’équipe médicale qui vous suit et qui seule, connaissant vos antécédents médicaux, sera en mesure de vous apporter une réponse adaptée à votre état de santé. Nous restons bien entendu à votre disposition pour toute recherche documentaire dans le domaine de la santé. L’Equipe des documentalistes de Questions-santé, Le service de réponses en ligne de la Cité de la santé. Service Questions-santé http://www.cite-sciences.fr/fr/au-programme/lieux-ressources/cite-de-la-sante/ Avez-vous trouvé cette réponse utile ? Oui cette réponse m'a été utile / Non cette réponse ne m'a pas été utile Avez-vous trouvé cette réponse utile ? Remplissez le formulaire de satisfaction !