|
|
|
|
|
Sous l'Ancien Régime, la notion
d'hérédité appartient essentiellement au droit et
à la médecine.
Seuls les juristes utilisent le terme "hérédité"
: hérédité des biens, hérédité
des offices. Les médecins n'utilisent que l'adjectif, dans l'expression
"maladies héréditaires", ainsi que le montre l'article
de l'Encyclopédie.
Des savants et philosophes, Maupertuis,
Buffon et Kant,
commencent à prendre au sérieux l'hérédité,
en tant que phénomène biologique très général,
dont les lois sont à découvrir.
C'est alors principalement du point de vue de l'homme qu'on s'intéresse
à l'hérédité.
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Au dix neuvième siècle,
les recherches empiriques et éventuellement expérimentales
sur l'hérédité, relèvent fondamentalement des
domaines suivants : l'anthropologie physique (Prichard)
; l'amélioration des végétaux et particulièrement
l'hybridation (Sageret, Naudin,
Vilmorin et Mendel) ; la cytologie
(Weismann, De
Vries) ; la biométrie et l'anthropométrie (Galton).
De nombreuses études d'ensemble sur l'hérédité
sont parues dans la seconde moitié du 19e siècle. Le livre
de Galton sur "L'Hérédité
naturelle" a eu un immense retentissement chez ceux qui ont plus tard
édifié la génétique.
Dans la période 1800-1850, le mot "hérédité"
acquiert son sens moderne, celui de l'une des propriétés
biologiques les plus fondamentales. Pendant un certain temps, on parlera
d'hérédité naturelle, par opposition à hérédité
d'institution (Lucas).
Dans la seconde moitié du dix neuvième siècle,
c'est le terme d'hérédité qui prévaut. Darwin
parle du "merveilleux principe d'hérédité"
et en fait un pivot de sa théorie de la sélection.
|
|
|
|
|
|
|
|
En 1900, trois botanistes De
Vries, Correns et Tschermak,
"redécouvrent" les lois de l'hybridation de Mendel. En
moins d'une décennie, une science nouvelle est fondée sur
cette base, que Bateson nomme "génétique".
Bateson en Angleterre et Cuénot
en France transposent cette science des plantes aux animaux.
La première génétique, qui seule mérite vraiment
le qualificatif de "mendélienne", consiste à postuler
l'existence d'unités hypothétiques appelées "gènes",
à partir d'une analyse formelle des produits de croisement de deux
individus de génotype
déterminé.
En Grande Bretagne, le mendélisme est mis en relation avec ce que
l'on savait des chromosomes
par Sutton et Janssens.
Bateson introduit dès 1902 les notions
d'allèle, homozygotie, hétérozygote. Johannsen
crée les termes et les concepts opératoires de "lignée
pure", "génotype" et "phénotype".
La nouvelle science révèle vite sa fécondité
dans la question du mode de transmission de certains types sanguins (Landsteiner).
Garrod et Cuénot
proposent des interprétations physiologiques et biochimiques du
mode d'action des gènes.
Cuénot
et Mercier réalisent aussi les premières études
expérimentales sur le déterminisme génétique
de la susceptibilité au cancer.
|
|
|
|
|
|
|
|
Dans le milieu des années 1910, la
génétique mendélienne est refondée sur la base
de la théorie chromosomique de l'hérédité.
Elle lui confère une première base matérielle et rend
compte aussi de toutes sortes de phénomènes mystérieux,
sous la seule hypothèse des lois de Mendel.
Les travaux sur la mouche du vinaigre réalisés par l'équipe
du biologiste américain Morgan jouent
un rôle fondamental à cet égard (Morgan,
Sturtevant, Müller, Bridges).
Sur cette base, la génétique va se développer dans
trois grandes voies théoriques :
· la génétique chromosomique proprement dite, avec
une attention particulière pour le problème des mutations
(Müller) ;
· la génétique des populations, qui deviendra à
partir des années 1930 l'épicentre de la théorie de
l'évolution,
et en particulier de la théorie de la sélection naturelle
(Chetverikov, Fisher, Haldane).
· la génétique physiologique, ou étude relative
au mode d'action des gènes
(Beadle et Ephrussi
; Beadle et Tatum).
Cette diversification des problèmes biologiques fondamentaux accessibles
à la génétique, explique que cette science, d'abord
marginale, soit devenue la base théorique de la biologie dans son
ensemble.
|
|
|
|
|
|
|
|
Cependant, jusqu'au milieu du vingtième
siècle, les gènes, quoique localisés sur les chromosomes,
demeurent des entités théoriques. Leurs caractères
physiques, leur nature matérielle (molécules
? assemblages de molécules
? organites subcellulaires ? cycles d'états physiologiques ?), tout
comme leur mode d'action demeurent mystérieux.
La découverte de l'ADN
comme support moléculaire des caractères héréditaires
a permis de refonder la génétique comme une science matérielle,
à même d'expliquer la base physique des caractères
héréditaires et le mode d'action des gènes.
(Avery, McLeod
et McCarthy, Watson
et Crick)
Les années d'or de la biologie
moléculaire sont les années 1950. Elles culminent avec
la découverte par Jacob et Monod,
au début des années 1960 du complexe de structures
et processus qui permettent d'expliquer la régulation de la production
des protéines
chez les bactéries
et virus
: ARN
messager, transcription de l'ADN
en ARN
messager, traduction de l'ARN
messager en séquences polypeptidiques, protéine
"répresseur", "opéron", allostérie.
La découverte du code
génétique par Nirenberg
et Matthaei, est strictement contemporaine
de ces travaux sur la régulation.
|
|
|
|
|
|
|
|
Dans les années 1970, la biologie
et la génétique moléculaire entrent dans une nouvelle
phase. Le génie
génétique, fondé sur des découvertes et
des procédés techniques permettant de découper et
d'insérer à volonté des séquences d'ADN
a rendu possible une nouvelle génétique moléculaire
(Jackson, Symons,
Berg . Celle ci, était plus
nuancée, plus consciente de la complexité de son objet, et
en même temps beaucoup plus puissante dans sa capacité d'intervention
directe sur les gènes.
La découverte sans doute la plus fondamentale dans la fin du
vingtième siècle, est celle de Gilbert
sur la structure "morcelée" des gènes
des eucaryotes, c'est-à-dire du fait qu'ils comportent une alternance
de séquences exprimées (exons) et de séquences non
exprimées (introns).
Une complexité insoupçonnée de structure et de fonctionnement
a pu ainsi être explorée.
|
|
|
|
|
|
|
|
Le décryptage du génome
humain (2000), est une prouesse technique à la mesure des avancées
théoriques de la seconde génétique. D'ores et déjà
plusieurs centaines de génomes
ont été, ou sont en cours de décryptage chez les microorganismes,
les plantes et les animaux.
La génétique moléculaire
et plus largement la biologie moléculaire, n'est plus à proprement
parler aujourd'hui la science de l'hérédité. Plus
exactement, elle n'est plus seulement cela : c'est le nouveau langage universel
de la biologie, qui s'ajoute à ceux de la théorie cellulaire,
de la biochimie et de la théorie de l'évolution.
Elle ne les supplante pas, mais y ajoute une nouvelle grille de description
des phénomènes biologiques.
|
|
|
Jean Gayon,
Professeur à l'Université Paris 1- Panthéon Sorbonne.
La version anglaise de cette page propose d'autres ressources que celles
présentées ici
>>>
Pour les découvrir, rendez vous sur History of Heredity and Genetics
>>> Le cerveau à travers les âges
>>> Histoire des théories de l'évolution
>>> Présentation générale |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|