Inventer
l’aluminium, c’est avant tout réussir à
séparer de la bauxite l’alumine qui deviendra aluminium
sous l’effet de l’électrolyse.
En
1831, le minéralogiste et ingénieur des mines français
Pierre Berthier découvre aux environs des Baux-de-Provence
des échantillons de minerai d'aluminium, auquel il donnera
le nom de bauxite. En 1845,
le scientifique allemand Friedrich Wöhler obtient des particules
d’aluminium impur. En 1854, en France, Henri Sainte-Claire
Deville produit de l’aluminium pur et met au point le premier
procédé de fabrication industriel. En 1886, Paul Héroult
en France et Charles Martin Hall aux États-Unis découvrent,
indépendamment, que l’oxyde d’aluminium ou alumine
se dissout dans la cryolite et peut être décomposé
par électrolyse pour donner du métal brut en fusion.
En 1887, le chimiste autrichien Karl Joseph Bayer fait breveter
un procédé de transformation.
Dès que Napoléon III s’intéresse à
ce nouveau métal, les recherches prennent vite une envergure
industrielle. En 1855, l’aluminium pur est présenté
à l’Exposition Universelle de Paris sous le nom d’"argile
transformée en argent". D’extraction difficile,
son cours avoisine alors celui de l’or. Nichés dans
leurs vitrines, médailles, bijoux et pièces d’orfèvrerie
témoignent de cette époque révolue.
Plus tard, son utilisation devient usuelle, et on en retrouve aussi
bien dans des horloges, des paires de jumelles ou des instruments
chirurgicaux...
Concurrence
et conflit
Performant, l’aluminium est
un métal stratégique de la Seconde Guerre mondiale.
En 1944, les États-Unis dépassent l’Allemagne,
premier producteur mondial à la fin des années trente,
en produisant 500 % de plus qu’avant guerre, soit 800 000
tonnes. Après le conflit, les industriels rivalisent pour
soutenir la cadence de fabrication et font appel à des designers
renommés pour promouvoir leurs produits et concurrencer les
matériaux traditionnels. Dans l’architecture, d’abord
comme en témoigne la maquette de l’Atomium construit
en 1956 à l’occasion de l’Exposition universelle
de Bruxelles ; dans la décoration ensuite, avec des chaises
signées Mies van der Rohe, puis, plus récemment, dans
des objets de loisirs : raquettes de tennis, vélo…
Recyclable, c’est là une de ses principales qualités
dont l’histoire remonte aux tranchées de la Première
Guerre mondiale.
Là, les poilus récupéraient l’aluminium
des obus et les transformaient en menus objets poignants, un étrange
artisanat qui a inspiré ce poème : "Il y a le
reflet de votre blancheur, au fond de cet aluminium dont on fait
des bagues" (Guillaume Apollinaire, "Poèmes à
Madeleine. Pour Madeleine seule"). De nos jours, des préoccupations
d’ordre économique et environnemental gouvernent le
recyclage des matériaux. L’aluminium présente
l’avantage de pouvoir être recyclé plusieurs
fois sans détérioration et ce, en économisant
de l’énergie, puisque la fabrication d’aluminium
secondaire ne consomme que 5% environ de l’énergie
nécessaire à la production d’aluminium primaire.
L'idéal
moderne
Moderne,
c’est le mot qui définit le mieux l’aluminium
en ce début de siècle.
Dés 1910, les alliages apparaissent, dont le Duralumin.
Durant la Première Guerre mondiale, il jouera un rôle
déterminant dans l’aviation. Après la guerre,
l’aluminium entre dans la vie quotidienne où il s’impose
rapidement. Fonctionnel, l’objet en aluminium doit cependant
être esthétique. Les fabricants sollicitent des designers
de talent, comme Marcel Breuer, Jacques Le Chevallier, René
Lalique, ou Warren McArthur pour donner un style aux objets utilitaires.
Dans l’électroménager, les designers ont fait
de l’aluminium un symbole d’avant-garde. Des architectes
novateurs expérimentent également ce nouveau matériau
dans l’ossature des bâtiments ou dans des pièces
décoratives moulées.
Au-delà des frontières
Esthétique, l’aluminium
s’adapte à tous les domaines artistiques.
Il habille aussi facilement les hauts buildings que nos lampes,
nos bouilloires, nos presse-citrons devenus "objets de design".
Des créateurs de toutes tendances tirent partie des alliages
révolutionnaires mis au point pour l’aéronautique
ou l’aérospatiale et les transforment en mobiliers,
vêtements haute couture, bijoux, accessoires. Sans l’aluminium,
il n’y aurait pas non plus les tenues de protection pour les
bouchers, pour les pompiers. L’aventure spatiale lui doit
beaucoup comme le dévoile un film du Centre national d’études
spatiales (CNES) sur les utilisations de haute technologie de l’aluminium
dans l’espace.
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